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3 avril 2009

NAGE EN EAU VIVE EN NORVEGE

FUGUE ARCTIQUE

NAGE EN EAU VIVE AU PAYS DES TROLLS (*)

imagesNous sommes sur la LORA, rivière à remous alimentée par le glacier Skavdalsegga qui s’annonce très manoeuvrière. Pleureurs à éviter, drossages agités et quelques rappels dont deux particulièrement inhospitaliers. Nos incantations de la veille, à Thor et à Odin, ont été entendues : le soleil est revenu. Après 200 mètres de touche-cailloux, nous passons sous le pont Brensetter, premier passage technique où, pour éviter plusieurs rochers émergés, nous devons maîtriser nos bacs stop. Contrairement aux apparences (et aux rumeurs) l’eau ne nous parait pas froide. Une belle rupture de pente, à la sortie du pont, nous invite à jouer dans une vague à surf bien tenace.

Les abords du torrent sont, ici, fournis d’une végétation plutôt rase : mousses, lichens et gros champignons plats, signes d’un climat assez rude. Debout sur la rive, nous vérifions avec plus de soins que d’habitude les fixations de nos palmes et les sangles de nos gilets-harnais. L’émotion est forte. Avant de plonger dans cette eau verte émeraude, nous crachons dans la rivière, sans scrupules et sans retenue, comme nous le conseille un vieil adage scandinave, afin d’impressionner les trolls et leur montrer qu’ils ne pourront rien contre nous… Folklorique mais rassurant !... 

2_0012Le parcours s’enfonce ensuite dans de petites gorges étroites qui révèlent plusieurs passages impressionnants à négocier. Nous avons bien fait de passer la matinée à les reconnaître en VTT. Maintenant, sur nos flotteurs, nous retrouvons, avec une certaine émotion, les cairns de pierres et de bois qui signalent les endroits critiques et, donc, les stops impératifs. Les rives granitiques tranchantes sont à éviter, d’autant que la veine d’eau principale nous impose de les longer. Les combinaisons et les flotteurs de mousse n’apprécient pas toujours ces contacts hostiles… Deux kilomètres de gorges des plus sportives, succession de drossages rapides et de seuils tumultueux. Deux rappels, bien francs, que nous éviterons par les extrémités. Les stop-contre sont rares mais bien marqués. Nous y faisons de grandes pauses récupératrices, tout en admirant cette eau d’une transparence totale où évoluent, indifférentes à notre présence, des truites saumonées. Nous reprenons la nage. Dans les remous, l’eau prend une couleur peppermint, ce qui donne à notre descente une véritable tonalité arctique. Nous sortons au niveau d’un vieux pont en bois (le seul encore en état), après 4 petits kilomètres de nage effectués en plus de 2 heures : de la classe IV, avec des passages en V, ce qui a occasionné de nombreuses reconnaissances, grandes consommatrices de temps et d’énergie !... Nous récupérons nos VTT, cachés ce matin dans les fougères, et remontons vers le campement tels des extra-terrestres, pédalant casqués et en combinaison néoprène, flotteur et palmes dans le dos…

Nous en profitons pendant quelques secondes en nous demandant combien de trolls, en dessous, s’accrochent à nos palmes, tellement la puissance de la vague est forte…

22 heures. Devant le feu de bois qui crépite, nous repensons aux deux dernières journées écoulées, débordantes de contrastes.Aujourd’hui, la LORA sauvage avec ses abords désertiques et inhabités, hier la SJOA (prononcez SJOUA), quelques kilomètres plus au Sud, rivière relativement large qui nous a surpris par son volume et par sa terrible puissance. L’Ubaye puissance 10. Rivière sans pièges (du moins sur le tronçon navigué : Heidal / Aamot) où s’enchaînent d’énormes rouleaux. Certains creux avoisinaient les 1,50 mètres. Propulsés, à toute vitesse, de vagues en vagues, qui nous font monter à la verticale, nous suscitons l’étonnement général. La SJOA est, en effet, une rivière très fréquentée : les rafteurs de la région (compagnies et indépendants) s’y donnent régulièrement rendez-vous. Ils étaient nombreux ce jour là. A notre passage, ils arrêtaient leurs pneumatiques pour nous encourager de leurs cris… Sur nos coquilles de noix, cockleshell  comme ils disent, nous sommes prioritaires.

Ce soir, près d’un feu, nous dégustons de succulentes pommes de terres cuites à la braise alors que, hier matin, nous étions accueillis chez un couple de vieux fermiers, Oddvar et Kristine, autour d’une table regorgeant de délices cuisinés spécialement pour nous : gaufres, galettes sablées, crème fraîche, coulis de framboise, café… Un petit déjeuner gargantuesque, une hospitalité réelle et sincère.

Les dernières braises du feu se consument et les 5° de température ambiante nous rappellent qu’il est temps de regagner nos duvets. Demain et les jours suivants, nous étrennerons nos palmes dans d’autres rivières, aussi surprenantes les unes que les autres :

La RANAELVA qui traverse le Cercle Polaire Arctique. Torrent très sinueux avec des seuils remarquables, dont un spectaculaire avec ses 3 mètres de hauteur.

La ROSSAVAGA, qui est alimentée par la fonte du glacier Svartisen, l’un des plus grand glacier d’Europe. Rivière relativement calme d’où se dégage une philosophie bien scandinave, un mélange de tranquillité et de beauté.

L’OTTA, large et endiablée, aux eaux bleues turquoises où nous devons affronter de nombreux passages techniques : vagues, seuils, porte-feuilles, rappels, drossages… mais aussi de longs planiols. Le passage final, la vague de Pollfoss, un long toboggan rapide où, après avoir posté un camarade en sécurité, nous glisserons en retenant notre souffle. Accélération et sensations fortes garanties…

03_04_2009_1812_18L’ULVAA (prononcez Ulvoa), long fleuve tranquille qui se termine par un tronçon de 2 kilomètres très tonique jusqu’à Broste. Un magnifique et périlleux passage, celui du Pont Suspendu, où l’on devra éviter un drossage siphonant à droite et un rappel bouillonnant à gauche… C’est sur cette rivière que nous apprécierons, une fois de plus la gentillesse et la serviabilité des autochtones. Un puissant 4x4 local nous aidera à sortir l’un de nos véhicules, embourbé dans une ornière.

Seuls dans des paysages à la fois inquiétants et merveilleux, désertiques mais singulièrement accueillants. Des vallées entières sans habitation, sans béton et sans barrages. Des rivières tantôt vertes, tantôt bleues, tantôt blanches, où pullulent truites et saumons. Des forêts hérissées de sapins géants regorgeantes de fruits des bois et, dans lesquelles, il est plus fréquent de rencontrer un renne sauvage qu’un troll. Nous (**) avons vécus, aux portes de l’Europe, une aventure qui laisse finalement l’exploit sportif au second plan (toutes les rivières descendues étaient des « premières » à la nage et nous vaudra un bel article dans le magazine CANOE KAYAK N°109).

troll

(*) Les trolls, génies maléfiques, sont présents partout en Norvège, surtout dans les contes pour enfants et dans les magasins de souvenirs. Mais, d’après d’anciennes légendes locales, ils hanteraient les forêts, les torrents et les lacs, nos terrains de jeux, alors… prudence et méfiance s’imposaient…

(**) Nous, c’étaient Michèle, Danièle, Monique, Kathy, Clémentine, François, Gilles et Jean-luc, membres de l’association Pennes Mirabeau Impulsion.

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