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1 août 2012

LA LECON DE L'U.T.B.

UTB 2012

Samedi 21 juillet, 4ième édition de l'Ultra Tour du Beaufortain. Et quelle édition !!!...

Cette course me tient particulièrement à coeur et ce pour plusieurs raisons :

- le massif du Beaufortain est un "bout d'Alpes féérique", ses paysages sont grandioses et enchanteurs

- l'ultra-trail m'attire de plus en plus. A croire que plus on devient vieux, moins on court vite et, du coup, on veut courir plus longtemps, remplaçant ainsi la qualité par la quantité...

- la complicité avec François Camoin, organisateur de cette grande course.

Ma récente entorse à la cheville compromettait ma participation à cet ultra, ultra pour lequel je m'entrainais assiduement depuis le début de l'année. Contre toute attente, la douleur a rapidement disparu et j'ai vite retrouvé de bonnes sentations. J'ai dû, contraint et forcé, me reposer pendant 15 jours mais les randos assez physiques faites avant l'UTB sur le GR 20 corse m'ont remises dans l'ambiance et dans l'esprit.

C'est donc confiant que j'ai pris le départ de l'UTB, me promettant de stopper la course au moindre signe de défaillance afin de ne pas hypothéquer la suite de l'été.

LA LECON DE L'UTB :  L'ultra est affaire de gestion de gestion de course.

On ne s'élance pas sur un ultra comme sur une autre course. Sur un ultra, il faut tout gérer : son endurance, son mental, son alimetation, ses temps de repos... Sur l'UTB, j'ai connu 3 PHASES qui, si elles étaient apparues dans le bon ordre, m'auraient assuré la ligne d'arrivée et, de surcroit, un classement fort correct. 

PHASE N°1 : Le "VASYMOLO"

Du départ jusqu'au Col du Coin, j'ai joué la carte de la raison. Grimpant les dénivelés à bonne allure mais sans excès, descendant les pistes sans excitation, parcourant les sentiers sans précipitation. Je me suis forcé à rester "en dedans" pour garder énergie, motivation et infux. Ceci s'est avéré plutôt payant puisque j'atteignais le Col du Coin (Kilomètre 34) avec une forme inespérée et une large avance par rapport à mon chrono d'il y a deux ans... J'ai bien, dans la descente vers St Guérin, après avoir rencontré un jeune gaillard de 23 ans (un ami de ma fille), accéléré le rythme pour ne pas me faire distancer mais, arrivé à la passerelle suspendue, j'ai levé le pied de manière à ne pas trop entamer mes réserves. Restons bien sage...

PHASE N°2 : Le "LACHELEFAUVEKIBOUENTOI"

Au col du Coin, je me sens en forme olympique, je suis euphorique. Le soleil perce les nuages faisant scintiller le Lac d'Amour. Je m'enflamme. Je descend jusqu'au lac en trotinant, double pas mal de concurrents dans les pierriers. Je monte vers le Col de Tutu en marchant énergiquement, entraînant dans mon sillage un suisse et un lyonnais. La Pierra Menta est invisible, cachée derrière d'épaisses nébulosités. Après le col, je tombe sur Pierre Duc, un ami, qui m'annonce que je suis dans les 200 (milieu de tableau). Je poursuis ma progression avec fougue et atteint assez vite le refuge de Presset. Je marque une petite pause au ravitaillement et repars plein d'entrain. J'avale la grimpette qui conduit au Col du Grand Fond. A la brèche de Parozan, j'aperçois de nombreux compétiteurs qui se suivent à la queue  leu leu dans la descente très raide et très caillouteuse. Je ne me pose pas de question et dévale, dré le pentu, la longue descente. Je double là une vingtaine de coureur. Le long de la retenue d'eau de Roselend, je me sens toujours en super forme ; aucune fatigue, aucune douleur ; je me dis que mes longues sorties dans les montagnes corses m'ont bien préparé à ce défi... J'alterne marche rapide, trot et  course soutenue jusqu'au refuge du Plan de Lai qui marque la moitié de la course (Kilomètre 49). Un bénévole m'annonce que je suis dans les 150 premiers. Au ravito, je me change (un sac nous attendait), je me nourris et m'abreuve correctement. Je repars, toujours débordant d'énergie. Beaucoup de coureurs abandonnent ici... Je fais équipe avec une belge jusqu'au Col de la Saulce. Montée assez rapide qui n'entame pas mon capital physique, dumoins c'est ce que je crois sur le moment. Arrivée au refuge du Col du Bonhomme, plein d'eau, discussion avec les bénévoles. Je suis toujours aussi bien, aucune douleur à la cheville (strappée préventivement), ni au genou (genou qui m'avait valu un abandon sur le marathon de Marseille en début d'année). Descente du magnifique sentier du Curé le long d'un torrent endiablé, passage de névés, le cadre est vraiment alpin, vraiment magnifique. Je commence à ressentir un peu de fatigue dans les jambes, mais je trouve cela normal et très acceptable vu le kilométrage et les dénivelés déjà absorbés. Au ravitaillement de La Gittaz (Kilomètre 61), j'ai besoin de marquer une pause. Je bois (boisson isotonique, thé, soupe,...), je mange (sucré, salé, fruits, Tuc, cacahuètes,...), souffle, parle peu. Je repars 30 minutes plus tard.

PHASE 3 : Le "RIENNEVAPLU"

La montée du secteur Bolchu me lessive. Subitement je n'ai plus d'énergie. J'ai les quadri en bois, je dos en compote. Je pousse comme un malade sur mes bâtons, espérant ainsi économiser et reposer mes jambes. Je fais équipe avec un gars de Mercury (Dominique) qui est bien atteint lui aussi. La montée est interminable mais nous ne nous faisons pas doubler si ce n'est par un olibrius qui nous dépasse comme une fusée ???... Sous le Col du Joly, je suis HS. J'essaie de positiver, de penser à ce que disait Kilian Jornet dans un reportage vu récemment : "Quand tu as mal, dis toi que ce n'est pas vrai ! Il faut savoir se mentir...". Mais je ne suis pas Kilian... Je m'accroche comme je peu à des petits groupes qui me distancent assez vite. Je teste la technique dite de "la marche afghanne", lue dans l'excellent opus de Guillaume Millet : "Ultra-trail. Plaisir, performance et santé". Quand la fatigue s'installe et le moral s'effondre, cette technique consiste à caler sa respiration sur ses pas : Deux pas en inspirant, 2 pas en expirant, 2 pas en retenue ; cela s'avère très efficace. Toujours en compagnie de Dominique, j'atteins le ravitaillement du Joly, bien "défoncé". Deux points me consolent néanmoins. 1) Je suis 138 ième (même si je me suis fait doubler dans cette dernière partie, j'ai conservé un bon classement). 2) Aucune douleur ne m'handicape pour le moment, c'est juste la fatigue qui me foudroie. Je récupère au chaud et me nourrit abondamment (l'appétit est toujours là ce qui est une bonne chose). Je redémarre 30 minutes plus tard avec toujours le même Dominique. Ce dernier me laisse sur place et je me retrouve seul dans la pénombre naissante. Un vent glacial souffle. Je m'équipe avec toutes les affaires emportées (micropolaire, coupe-vent, Buff, gants...). Malgré cela, je grelotte. Je marche aussi vite que je peux mais en définitive je n'avance pas très vite. Je me fais doubler par des dizaines de coureurs. Sur les crètes qui mènent aux Saisies, le froid est polaire. Je mets cette sensation sur le compte de ma très faible vitesse. J'accuse le coup et me re-motive en me disant que, même en marchant lentement, je devrais arriver au bout. En descendant les pistes de la station, une douleur vive me saisit le genou gauche... La douleur empire au fil des kilomètres, des mètres... J'arrive aux Saisies (Kilomètre 88) en boitillant. Je dois me résoudre à abandonner à une dizaine de kilomètres du but seulement. Mais je sais que la descente vers Queige est terrible et je ne me sens pas d'attaque à l'affronter... Au Saisies, j'étais 224 ième au classement, encore honorable...

CONCLUSION

J'ai encore pas mal de choses à apprendre. Notamment, il faut que je réussisse à enrayer cette espèce de fougue qui me fait m'enflammer, cette euphorie qui me fait perdre le sens des réalités. Je dois garder en mémoire cette maxime lue un jour sur le forum de l'UTMB "Si tu peux courir vite, cours lentement. Si tu peux courir lentement marche. Si tu peux marcher, fais une longue pause...". Toute la gestion de course (et la sagesse du coureur) est contenue dans cette phrase. A moi de l'appliquer sur un prochain ultra.

Je reste néanmoins satisfait de ma course car, au fond de moi même, je n'espérais pas aller jusqu'au 90 ième kilomètre. D'autant que les conditions météo (bruine, froid,...) et de terrain (boue, sol glissant...) étaient coriaces cette année. Sur les 400 et quelques inscrits, seuls 222 coureurs ont terminés (131 abandons, 36 éliminés à cause des barrières horaires).

Et, pour une fois, je suis sûr que cet échec relatif me sera profitable. Je suis sûr que je saurai retenir la leçon...

UTB           Site de la course : www.ultratour-beaufortain.fr

 

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