LE TRAIL DU GRAND DUC. AUTREMENT...

Dimanche 30 juin, l'Ultra du Grand Duc se courait en Chartreuse. Cette course m'a toujours attirée mais il était hors de question que je m'aligne sur un ultra à quelques semaines de celui du Beaufortain. 

  

J'ai lu récemment le dernier livre de A.J.Jacobs, intitulé "Je crève la forme !" et sous-titré "L'humble quête d'un homme visant à la perfection corporelle."  Un livre où l'auteur se lance à la recherche, de manière détaillée et très humouristique, du corps parfait et du mode de vie le plus sain. Un des chapitres est consacré à l'altruisme, au bénévolat, à la générosité désintéressée, attitudes et actions qui contriburaient à faire vivre mieux celui qui les dispense.  Cela fait des années que je m'inscris à des trails, que je récupère mon t-shirt souvenir, que je cours sur des chemins balisés, que je croise des dizaines de bénévoles aux différents points du parcours, que je râle quand un petit couac survient, que je dévalise les ravitaillement, que je prend des douches et profite des kinés après l'arrivée, que je rendre chez moi me reposer sans me soucier de tout le travail qu'a nécessité l'organisation d'une telle épreuve avant, pendant et après le jour J. Bref, comme des milliers d'autres coureurs, cela fait des années que je comporte en consommateur. Un consommateur qui paie, qui consomme et qui retourne chez lui... Bref, je cours des trails comme lorsque je vais acheter un saucisson ou voir un film au cinéma, sans le poser la moindre question du pourquoi du comment...

L'organisation du Grand Duc recherchait des bénévoles. Des serre-files. J'ai proposé ma candidature qui a été aussitôt acceptée. C'est ainsi que je me suis retrouvé à Saint Pierre de Chartreuse vers les 11 h pour prendre mes fonctions. L'ultra du Grand Duc fait 80 kilomètres de long et près de 5000 m de dénivelé positif ; le parcours est découpé en plusieurs tronçons couverts par autant de binomes de serre-files. On m'avait affecté sur le secteur "Saint-Pierre - Col de la Cochette" et je faisais équipe avec Claude, un coureur local. Le rôle du serre-file est assez simple : il consiste à partir derrière le dernier coureur et à fermer la marche. Equipés d'une pharmacie, d'un GPS et d'une radio, nous assurons la sécurité et la liaison avec le PC Course au cas où un coureur abandonne ou se blesse. 

L'utra du Grand Duc se court en solo (80 kms), en duo (4 x 40 kms) ou en relais de 5 coureurs. La barrière horaire à Saint-Pierre était fixée à 12 h30, donc nous devions partir derrière le dernier coureur passant les 12 h30 (ceux qui arrivaient après étant disqualifiés). C'était sans compter les relais... Nous avons du attendre le dernier passage de relais. Et nous avons du attendre longtemps... 

J'en profite pour discuter avec Sylvain Bazin, un coureur-aventurier dont j'admire la philosophie de vie et dont je suis le parcours sur le net. Nous parlons de trail, de voyage, de son livre sur Compostelle qui va bientôt sortir, de nos amis communs (dont Matthieu de DBDB), de son prochain projet d'exception (la Via Francigena). Ce gars est d'une gentillesse et d'une accessibilité extrème. Au bout de 10 minutes de conversation, j'ai l'impression d'avoir à faire à un ami de longue date...

13 h30, 1 heure que nous aurions du partir mais deux coureuses de relais sont toujours attendues. Le soleil cogne. Il nous tarde de nous élancer sur les chemins. Lionel, le directeur de course, nous avait pourtant bien prévenu : "Le rôle de serre-file est primordial pour le Grand Duc mais c'est une activité très ingrate car on ne sait pas à quelle heuree on part, on ne sait pas à quelle allure on va progresser (marche, trot, course soutenue...), on se sait pas à quelle heure on va arriver... la patience est la première qualité du serre-file !". Avec mon binome, Claude, nous attendons donc patiemment discutant sports et voyages, grignotant abricots secs et biscuits salés qui se raréfient sur les tables du ravitaillement. Les coureurs qui arrivent sont pour la plupart recouverts de boue, leurs baskets sont de grosses mottes diformes. Cela laisse présager de l'état du terrain...

   

15 h, les deux dernières coureuses passent  le relais à leurs coéquipères ; nous enchainons derrière elles... 

De serre-file, je passe vite en mode "serre-fille". Je cours derrière Brigitte (une traileuse de Chambéry) qui, pressée d'en découdre, part à un bon rhytme.

Je laisse Claude seul, ce dernier fermant la course. Le chemin est varié ; il y a des passages de bitume, de larges pistes et des single-trancks. Un fort dénivelé en forêt nous conduit au col de la Cochette. A cet endroit, en théorie, ma mission s'achève je dois passer le relais à deux nouveaux serre-files. Je leur transmet GPS et pharmacie. Comme se col se situe en pleine montagne, je décide de continuer avec Brigitte jusqu'au Col de Porte. Les deux nouveaux serre-files attendent mon binome, Claude, pour récupérer la radio ; comme ils sont jeunes et fougueux ils nous rattraperont bien vite. Après une descente sur un sentier étroit et boueux, une relance sur terrain plat et un poste de ravitaillement fort sympathique, nous attaquons la montée de la Pinéa le long d'un relief impressionnant. Le sentier est bordé de grosses fougères et encombré d'arbres morts qu'il nous faut enjamber ou contourner. Les 2 serre-files nous ont rattrapé. La montée jusqu'à la Pinéa est longue et éprouvante. Nous encouragons Brigitte qui est ravie d'être accompagnée de la sorte. 

  

S'en suit une longue descente jusqu'au Col de Porte où nous apprenons que les relais ont été neutralisés...

Très bonne expérience que ce rôle de serre-file. Elle m'a permi de relativiser pas mal de choses. Désormais, je ne regarderai plus les bénévoles comme avant. Désormais je les regarderai avec tout le respect et la reconnaissance qu'ils méritent. Participer à l'organisation d'une course devrait faire partie du parcours de tout coureur.

Comments

[Akuna]

bienvenu de l'autre cote du miroir !